Les céréales au cœur de la colère européenne vis-à-vis des importations jugées déloyales

En Pologne, les agriculteurs ont, une nouvelle fois, après un incident similaire le 11 février, déversé des céréales sur les rails après avoir ouvert deux wagons ukrainiens pour protester contre ce qu'ils considèrent comme une concurrence déloyale, provoquant à nouveau la colère de Kiev

Crédit photo ©capture d'écran Suspilne-Lviv
Une montée en puissance des protestations à travers le continent européen prend forme face à la concurrence de produits importés et moins chers. Les agriculteurs polonais ont procédé, pour la deuxième fois, à des déversements de céréales ukrainiennes sur les rails après avoir ouvert deux wagons.

En Pologne, les agriculteurs ont, une nouvelle fois, après un incident similaire le 11 février, déversé des céréales sur les rails après avoir ouvert deux wagons ukrainiens pour protester contre ce qu'ils considèrent comme une concurrence déloyale, provoquant à nouveau la colère de Kiev.

Lors du précédent, Czeslaw Siekierski, ministre polonais de l'Agriculture, à peine en poste dans le nouveau gouvernement, avait dû adresser ses excuses à son voisin en arguant d’un « acte de désespoir » en réaction à « leur situation extrêmement difficile ».

>>> Lire aussi : Déversement de céréales, blocage du port d'Anvers : les agriculteurs maintiennent la pression

Les agriculteurs polonais ont lancé ce nouveau mouvement de protestation le 20 février en bloquant une centaine de routes et les points de passage frontaliers, pour dénoncer notamment les importations agroalimentaires ukrainiennes jugées "incontrôlées" et réclamer une révision des règles européennes.

"Un groupe d'agriculteurs s'est engagé sur la voie ferrée qui longe la route bloquée et est resté […] quelques minutes. Il n'y a pas eu de recours à la force. On a constaté le déversement d'une petite quantité de céréales sur les voies", a indiqué la porte-parole de la police de Przemysl.

Du maïs à destination de l'Allemagne

Réagissant à l'incident à Medyka (localité polonaise à la frontière avec l'Ukraine), le ministre ukrainien de l'Agriculture, Mykola Solsky, a déclaré que Kiev "condamnait fermement de telles formes de protestation", ajoutant que le wagon de marchandises transportait du maïs à destination de l'Allemagne. "Entraver le commerce de l'Ukraine avec d'autres pays du monde est inacceptable et va à l'encontre des objectifs communs ukraino-polonais."

Le secteur agricole de l'Ukraine est lui-même percuté par l'invasion russe, qui lui impose un blocus maritime en mer Noire, contraignant la sortie des grains du pays, tandis que les bombardements ont rendu les terres agricoles rendues inutilisables. "Depuis deux ans, les agriculteurs ukrainiens récoltent des céréales, vêtus de gilets pare-balles, sous les tirs de roquettes et la menace des mines", s’est indigné le ministre ukrainien des Infrastructures, Oleksandre Koubrakov, sur X (ex-Twitter), ajoutant que la sécurité alimentaire mondiale "dépend des céréales ukrainiennes".

La veille, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé que le blocus de la frontière polonaise par des transporteurs routiers et des agriculteurs polonais témoignait de "l'érosion de la solidarité" envers son pays.

"Cette année, le blé se vend la moitié du prix de l'année dernière", a dénoncé Tomasz Golak, propriétaire d'une quinzaine d'hectares abritant une ferme animale et des champs de céréales.

Le trafic routier avec la Pologne a été pourtant crucial depuis le début de cette guerre pour permettre aux entreprises ukrainiennes de continuer à exporter. Mais cette situation a provoqué la colère des agriculteurs et des entreprises de transport polonais, qui se plaignent des tarifs ukrainiens, avec lesquels ils ne peuvent rivaliser.

Large mouvement de protestation en Europe

 Ces actions s'inscrivent dans un large mouvement de protestations d'agriculteurs à travers le continent européen à l'égard d'importation de produits moins chers. 

À titre d'exemple, plusieurs centaines de tracteurs ont commencé, le mercredi 21 février, à converger vers le centre de Madrid à l'occasion d'une nouvelle journée de mobilisation à l'appel du syndicat agricole Union de Uniones (l'Union des Syndicats). Les agriculteurs espagnols, qui manifestent de manière ininterrompue dans le pays depuis le 1er février, dénoncent notamment la concurrence jugée déloyale de certains pays extérieurs à l'UE, demandent à pouvoir "répercuter les coûts de production sur le prix final de leurs produits afin de ne pas vendre à perte" et réclament un meilleur "contrôle des importations", a expliqué Luis Cortés, coordinateur national du syndicat sur la chaîne de télévision publique RTVE.

Ces produits importés doivent "être soumis aux mêmes contraintes que celles qui sont imposées aux agriculteurs espagnols", a ajouté le porte-parole du mouvement, en estimant que les mesures proposées par le gouvernement du Premier ministre Pedro Sánchez étaient insuffisantes. Ce dernier s’est engagé défendre à Bruxelles une simplification de la Politique agricole commune (PAC) et à améliorer la loi espagnole sur la chaîne alimentaire pour empêcher que les agriculteurs ne vendent leurs produits à perte.

Outre ce rassemblement madrilène, d'autres sont prévus à travers le pays à l'appel des trois organisations professionnelles représentatives du secteur (Asaja, COAG et UPA).

 La Commission européenne, soumise à une échéance capitale en juin, a fait des concessions ces dernières semaines aux agriculteurs.

La rédaction (avec l'AFP)

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