Transition énergétique : grande incertitude dans le transport routier

Les professionnels du transport routier de marchandises (TRM) français s’étaient donné rendez-vous, mi-novembre 2022 au Matmut Stadium de Lyon (Rhône), à l’invitation de la Fédération Française de Carrosserie (FFC) qui y organisait les Rencontres de la filière. Le climat était à l'incertitude, pour ne pas écrire à l'inquiétude, tant chez les constructeurs de véhicules industriels, les carrossiers, que chez les transporteurs.


Deux conférences ont permis de constater le désarroi des transporteurs routiers, et les interrogations des constructeurs, face notamment à la transition énergétique qui impose des choix de matériels rapides tout en restant onéreux :

  • Transition énergétique, le scénario impossible de Bruxelles

  • Comment les ZFE redéfinissent la mobilité urbaine et ses enjeux


Tous favorables au mix énergétique

Qu’ils soient transporteurs, constructeurs de camions, carrossiers ou équipementiers, la transition énergétique est dans toutes les têtes des professionnels du transport routier de marchandises (TRM). L’Union européenne a fixé des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre drastiques aux constructeurs de véhicules industriels, aux transporteurs les utilisant, et bientôt seront concernés les carrossiers pour les remorques, mais aussi les manufacturiers pneumatiques.

Lors des Rencontres FFC, le camion à pile à combustible hydrogène Le Hyundai Xcient était présenté pour la première fois en France.


Le secteur peut-il les respecter ? « Cela n'est pas aisé, et représente beaucoup d’efforts, d’investissements », estimait Jonas Odermalm, directeur produit Electromobilité de Volvo Trucks.

« L'avenir est à l'électrique, complétait Mats Gunnarsson, directeur commercial de Scania. Mais dans certaines niches on ne pourra pas se passer de moteur thermique. Il faut garder la possibilité du moteur thermique et des biocarburants ».

 

Les camions à moteur thermique avec recours au biocarburant, comme ce MAN TGX "B100 exclusif" présenté au Matmut stadium de Gerland le 17 novembre, représentent une solution viable dans la transition énergétique.


Les regards se tournaient vers Florence Dupasquier, Pdg du groupe Samat, qui a misé sur l’acquisition de camions au gaz pour sa spécialité, le convoi exceptionnel. En effet, le camion électrique n’est pas compétitif ni même suffisamment performant à l’heure actuelle pour tracter de lourdes charges, sur des distances trop importantes. « Avec la forte inflation sur le gaz, les cartes sont rebattues, constatait la présidente. On est un peu perdu, on teste plusieurs solutions, chacune a ses avantages et ses contraintes. Le mix énergétique a toutes ses chances ».

Euro 7, la norme qui inquiète


Le paquet Fit for 55 de l’Union Européenne (UE) a obligé les industriels du camion à investir massivement en recherche et développement (R&D) sur le camion électrique, qu’il soit à batteries (BEV) ou à pile fonctionnant à l’hydrogène (FCEV) pour la longue distance. Les résultats ont été rapides pour mettre en service des camions BEV destinés à la logistique urbaine ou au transport des déchets. Ce sera plus long pour les véhicules FCEV.

En revanche, les industriels ne comprennent pas que, parallèlement à l’effort sur le camion zéro émission, Bruxelles durcisse encore les normes antipollution sur les véhicules industriels à moteur thermique, ce qui arrivera avec Euro 7 en 2027, exigeant des seuils toujours plus bas, nécessitant à nouveau de lourds investissements en R&D. Ces véhicules sont pourtant destinés à disparaître à moyen terme.

« Nous sommes inquiets de l’arrivée d’Euro 7, confirmait Mats Gunnarson. Il sera difficile de poursuivre les investissements sur les véhicules électriques, sur les stations de recharge, et en même temps sur une réduction encore plus poussée des émissions des camions à moteur thermique dans ces délais », avertissait Henri Paccalin, Pdg de Daimler Truck France et de la branche VI de la Chambre syndicale des importateurs (CSIAM).

Côté carrossiers, l’inquiétude se cristallise autour de l’absence d’aides de l’Etat sur l’acquisition de semi-remorques fonctionnant à l’électricité. Cela n’empêche pas les carrossiers et équipementiers d’avancer, notamment dans le transport frigorifique. « La production de froid est énergivore, commentait Christophe Danton, directeur marketing de Chereau. Nous explorons des pistes comme le passage du diesel à l’électrique ou à l’hydrogène ».

Les ZFE au pilori


« L’objectif des zones à faibles émissions (ZFE) est de réduire les émissions des transports pour limiter le nombre de morts dus à la pollution », rappelait Mathieu Vieira, élu de Lyon Métropole, en préambule de la seconde conférence. Un engagement d'intérêt général que ne réfutent pas les professionnels du TRM. Ils demandent seulement que les calendriers soient harmonisés d’une ville à l’autre, ce qui n’est pas le cas avec ces ZFE : chaque collectivité locale impose ses propres interdictions, sans tenir compte de ce que font les voisins.

« En 2026, seuls les camions Crit'air 1 et électriques seront autorisés à circuler dans la métropole de Lyon, confirmait Matthieu Vieira. Il y aura des dérogations, par exemple pour les porte-malaxeur. Mais on doit repenser la logistique urbaine pour livrer différemment : il faut une centralisation des livraisons par secteur géographique ».

Olivier Poncelet délégué général de l’Union TLF, résumait l’état d’esprit des transporteurs : « on partage l'objectif d'amélioration de qualité de l'air.  Mais il s'agit de prendre en compte la réalité du TRM. Les calendriers ne sont pas harmonisés entre les métropoles. Ailleurs en Europe, aucun calendrier ne vise à l'interdiction du gasoil comme en France ».

« Pendant la transition, on doit pouvoir continuer à utiliser des véhicules de toutes énergies, tout en poursuivant la politique d'aide publique à l’acquisition de véhicules électriques », ajoutait Jean-Yves Gautier, président de la commission Logistique urbaine de la FNTR et de Gautier Fret Solutions, transporteur basé à Rennes (Ille-et-Vilaine).

Matthieu Vieira, conseiller métropolitain de Lyon, Olivier Poncelet, délégué général de l'Union TLF, et Jean-Yves Gautier, président de la commission Logistique urbaine de la FNTR (de gauche à droite), ont débattu des ZFE, lors des Rencontres FFC le 17 novembre.


 

"Pendant la transition, les transporteurs doivent pouvoir continuer l'usage de véhicules de toutes énergies, et profiter de l'aide publique à l'acquisition de camions électriques", a rappelé Jean-Yves Gautier, président de la commission Logistique urbaine de la FNTR et de Gautier Fret Solutions, transporteur basé à Rennes (Ille-et-Vilaine).


Une progressivité et un calendrier clair, sur le plan national, qui sont appelés par tous les professionnels du secteur du TRM. Reste à savoir s’ils seront entendus…

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