A quelques jours du Grand Prix Camions de Nogaro qui aura lieu les 21 et 22 juin 2025 sur le circuit Paul Armagnac, France Routes a croisé celle de Jonathan André, qui pilote le MAN #44 du Lion Truck Racing. La saison a mal débuté pour lui (il est classé 21e à l'issue du premier GP du Castellet), mais l’équipe a des ambitions pour le championnat de France et va bientôt disposer d’un nouveau camion.
Comment expliquez-vous ce départ décevant lors du GP du Castellet ?
Nous avions fait des essais sur le circuit de Nogaro, où nous avons réalisé de très belles performances, puis à Misano en Italie (lors du premier GP du Championnat d'Europe). J'ai signé trois podiums dans ma catégorie. L'équipe arrivait donc en confiance dans le Var. Je termine deuxième de la première session de qualification mais au départ de la première course, un camion m'est rentré dedans. Je me suis fait sortir, le samedi était plié...
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Et le dimanche ?
Je pars dixième sur la grille, un pilote loupe une vitesse, le camion qui était derrière lui rentre dedans et je tape aussi. A cause de l'impact un tuyau d’air du système du freinage a été sectionné. Sur le moment, je ne l'ai pas vu. A la fin de la ligne droite quand j’ai voulu freiner, plus rien... J'ai vu que j'allais taper fort les camions devant, j'ai visé un petit espace entre le mur et un camion mais j'ai touché le mur... Il y a eu des dégâts matériels, mais pas corporel.
La passion du camion vous est venue dès l’enfance ?
Mon père était conducteur routier, il a également fait un peu de courses de camion. Il a fini sa carrière comme formateur à l’Aftral. Il est maintenant retraité mais a toujours la passion du camion. Dès l’âge de 6 ans je le suivais sur les circuits. Je ne les ai plus quittés depuis, et j’ai 41 ans ! Avec lui, cela fait 35 ans que nous y allons ensemble. J’ai grandi dans les paddocks. Les pilotes à qui je demandais des autographes, je m'oppose désormais à leur fils.
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Mais vous n'êtes pilote que depuis quelques années, pourquoi ?
J’ai été pendant longtemps le team manager et l'ingénieur piste du Lion Truck Racing. Dès qu'un camion était en piste, j’analysais les réactions du pilote, j’établissais un rapport pour les mécaniciens, suggérer des adaptations techniques, améliorer les réglages. Je traquais les petites erreurs dans le but de gagner le moindre millième de seconde.
Comment avez-vous basculé dans la cabine, au poste de pilotage ?
Le fondateur de l'équipe, Patrick Folleas, qui est aussi le créateur du groupe BFT Transports, m'a permis de devenir team manager, après avoir engagé Pascal Calas en tant qu'ingénieur. L’aventure a débuté en 2012. La même année, Steffie Halm devenait la première femme championne de France. J’ai appris la télémétrie en la coachant. Puis Anthony Janiec, un top pilote, a été plusieurs fois champion de France au sein du Lion Truck. J'ai grandi grâce à eux. Malheureusement, en 2020 Patrick est décédé. Bruno Folleas, son frère, et Maryline, l'épouse de Patrick, ont repris l'entreprise. Ils nous ont fait confiance pour faire fonctionner l’écurie, mais nous n’avions plus de leader.
Durant l'été 2022, notre pilote Anthony Janiec est décédé à son tour. La question s'est posée de tout arrêter, c'était compliqué. Personnellement, je souhaitais rouler sur le circuit du Mans car la saison était engagée, je voulais que l’équipe puisse dire au revoir à ses partenaires, au public, faire une dernière course. Pascal Calas m'a dit qu'il pensait que je pouvais m'engager, et peu importe ma place au classement.
J'ai fait des tours d'essais à Nogaro. Fin septembre 2022, j'étais engagé sur les 24H Camions, et ça s'est bien passé. J'ai même gagné une course le samedi. Les partenaires nous ont tous soutenus et nous avons continué l'aventure... J'ai fait deux saisons complètes, j'ai fini cinquième la première année puis quatrième l'année dernière.
C'est votre dernière saison au volant du MAN que conduisait Anthony, puisqu'un nouveau camion est en préparation, c'est bien ça ?
Exactement ! Un MAN, toujours, mais sa puissance monte à 1 200 ch. Il est plus performant. Le partenaire du Lion Truck, Sampa, fournit des pièces spécifiques comme les moyeux de roues.
Vous revenez donc du Castellet avec moins de points que prévu. Quel est votre objectif désormais ?
Cette année je visais le podium, mais soyons réaliste, ça va être difficile, maintenant... Il y a de très bons concurrents en face. Par contre j'ai comme objectif de monter sur le podium chaque week-end pour marquer de gros points. Dans tous les cas, ce sera une année pour se développer. Le but est aussi d’aller voir du côté du championnat européen.
Crédit photo : Marc de Mattia
Le MAN actuel est en réparation, le nouveau n’est pas prêt et Nogaro arrive vite. Comment va se dérouler la suite de la saison ?
Le nouveau camion est en construction, le but était de faire les premiers essais avec pour voir si nous le mettions en piste en cours de saison. L’objectif premier était de le sortir à Magny- Cours, mi-juillet. On va voir si on l'aligne dès Nogaro...
Mais déjà, en avant-première pour France Routes, parlez-nous de ce nouveau camion...
Les seules pièces d’origine sont la cabine, les portières, les deux poutres de châssis et le bloc moteur de 13 l. J’ai toujours un MAN, mais avec la cabine de nouvelle génération. Nous refaisons toute la cosmétique, redessinons le poste de pilotage... Nous optimisons aussi le refroidissement des freins. Nous avons fait un faux châssis qui est différent je ne peux pas donner les secrets avant la première course mais nous avons procédé à des évolutions parce que l'ancien châssis était parfois un peu souple, nous avons voulu qu’il soit plus rigide.
Il y a d'autres points d'améliorations ?
La technologie sur les essieux a évolué, à l'avant et à l'arrière. Nous avons désormais un carrossage autorisé. Nous faisons beaucoup de petits développements mais visuellement, il semblera à l'ancien. Nous travaillons également sur les amortisseurs. Le but est toujours d'aller plus haut dans la hiérarchie des pilotes.
Vidéo : construction d'un camion de courses par Lion Truck Racing, épisode 2
Sur votre chaine Youtube, vous racontez les étapes de construction... Les médias, ça vous plait ?
Je suis passionné, alors je partage cette aventure techologique mais aussi les essais, les coulisses. J'ai découvert que certains de mes concurrents apprennent des choses en les regardant !
Quand nous avons eu l’idée de concevoir ce nouveau camion avec Emmanuel Vincent, le président de Sampa, nous avons convenu de partager les coulisses avec le public. En France, nous sommes peu nombreux à savoir comment se construit un camion. Nous avons donc lancé cette série en vidéo.
Par exemple, un truc tout bête, nous souhaitions abaisser le siège pour avoir un meilleur centre de gravité. Dans une des vidéos, on me voit faire des schémas afin de voir concrètement comment faire, expliquer au public mais également à mon équipe la position idéale en tant que pilote. Cette petite vidéo, destinée à la base au public, nous a beaucoup servi pour trouver la position idéale. Avec ce nouveau siège, je suis un peu plus haut que pendant la dernière saison et plus à l’aise.
L'équipe du Lion Truck Racing est composée de combien de personnes ?
Nous sommes au minimum 6 à chaque course, avec Pascal Calas, chef mécanicien, assisté de 3 personnes. A l'atelier ils sont toujours 3 à travailler sachant qu’ils réalisent mon camion mais travaillent aussi pour d’autres équipes.
Au Castellet, entre la boutique, la loge où l’équipe a reçu 200 invités, nous étions une quinzaine. J'en profite pour remercier BFT Transport, qui est toujours au soutien.